@the seer
[crédit; vixen (code)]

Le regard que le triton jeta au ciel miroitait la noirceur des nuées. Des semaines, des mois que l’on avait plus vu le soleil, mais sur Barter Bay, les brumes qui enveloppaient les terres achevaient de transformer le crépuscule en nuit. L’île blanche n’avait jamais été aussi mal porté son nom.

Son profond capuchon était désormais son seul refuge. Sans lumière, il était désarmé, privé de sa meilleure protection. L’on y repense à deux fois avant de s’en prendre à un homme dans la fleur de l’âge. Une silhouette voûtée est une proie facile. Il détournait la moindre lueur que torches, lanternes et autres flammes lui procuraient, mais ces vagues éclats ne lui permettaient pas d’invoquer plus que de fugaces spectres sur son visage. Rien qui ne trahisse l’oeil pour plus de quelques secondes. Et cela ne changerait pas, pas tant que le soleil restait prisonnier de sa gangue de nuages.

Qu’est-ce qui les maintenaient ainsi privés de lumière? Quels péchés avaient-ils à expier? Quels dieux avaient-ils à prier? Quelles créatures heliophage avaient-ils à occire? C’était ce qu’Hephaïstion était venu demander.

Il restait encore la possibilité que l’entité-même qu’il était venu questionner soit la cause même de la disparition du soleil. Alors qu’il s’éloignait du port pour s’enfoncer dans les marécages, sa conscience le tiraillait. C’était un bruit qui courait. La raison pour laquelle il n’était pas venu toutes ces longues semaines. La disparition du soleil avait coïncidé avec l’arrivée du prophète. “Have we worshipped enough? Will the sun ever come back?” * pensait-il être venu demander. Mais quand Héphaïstion posa ses yeux sur l’antre fumante, il en eu la certitude, (vraiment? le moindre doute en lui était-il éteint?), ce n’était pas au prophète de le décider. Le soleil avait disparu de sa propre volonté, et c’était par sa propre volonté qu’il réapparaîtrait. Quand tritons et sirènes auraient renforcé leur foi en leur astre, quand ils et elles l’auraient mérité par louanges et vénérations.

Il se retrouva alors muet devant l’effigie fatidique, ses mots préparés se dissipant au vent. Son regard est fuyant, hésitant. Trouve les traits marbrés et retrouve certitude, découvre audace parée de sincérité.

“Go” *, fût son seul souhait, provenant du plus profond de son être. Ses yeux de vieillard reflètent toute la méfiance, toute l’animosité qu’il éprouve à l’égard de l’omniscience sans visage. “What more do you want? Why are you still here?... Who are you?” * enfin, dans un grognement soupçonneux. Ami ou ennemi du soleil?