Ordre donné, raison inexpliquée. Peu importe, elle lui obéit. Soldate prête à tout pour satisfaire amiral. Elle fait même fît de son mal en mer deux jours durant pour accomplir mission. Sort de son cadre habituel pour rejoindre décadence des infâmes. L’uniforme laissé au repos pour passer incognito, glisser dans l’anonymat de la foule à tout va. Pourtant il y a bien quelque chose dans son port altier qui trahit sa provenance. Rendez-vous pris la veille dans une de ces ruelles aux pavés ciselés par l’obscurité. Elle rejoint l’échoppe coincée entre deux bâtisses corrodées. L’herboriste-alchimiste l’accueille d’un regard entendu et part illico dans les tréfonds de son arrière-boutique. Le temps lui laisse la possibilité de faire courir iris curieuses sur les elixirs et potions étalées. Sanitasmira rappelle les possibles heurts qu’un explorateur malhabile et imprudent pourrait vouloir effacer. Objet à garder précieusement, la fiole finit dans sa main pour une demande supplémentaire sur ses propres deniers. Transaction secrète se fait quand le marchand revient avec commande exceptionnelle. L’aegis pour miracle embouteillée, maintenant qu’elle en connaît les bienfaits, se voit rassurée par les mesures prises par haut gradé. La résistance promise à tout et pour une vie ne semble pas exagérée au vu des habitants de ce monde. Et elle ne peut s’empêcher d’avoir le coeur apaisé.

Talons rythment maintenant démarche effilée dont on ne se méfie pas. Ici, forbans font loi et se mêlent aux miséreux d’une fange qu’elle frôle, trop gracile pour eux. Et en elle se mélange les sentiments : la compassion le temps d’un flirt avec la pitié pour les plus pauvres, le dédain hautain pour ceux qui s’prennent pour rois marécageux. Les rires gras éclatent à ses oreilles, les musiques distordues saignent et l’intelligence de tous s’étiole à chaque rasade perçue par-delà les fenêtres des tavernes animées. Spectacle désastre, elle sait qu’elle ne peut s’attarder. "Oh my apalogy.", qui s’échappe à la bousculade rencontrée. La voix râpeuse qui la cueille mériterait une réplique cinglante, mais c’est le visage de l’homme qui la frappe. Faciès de bête par le passé enfermée, elle ne retient pas le regard ciselés sur ses traits émaciés. Kraken “Barbe noire” aka Roy Howler. Identité à dégueuler qui clignote dans sa tête à force de mémoriser les listes de prisonniers et hybrides recherchés. Lui grogne avertissement rauque, transpire menace noire, et elle, reste pantoise, observant le malin s’éloigner… Milliers de scénarios tissent toile dans l’esprit aiguisé, et pourtant ne voit qu’un devoir : arrêter l’évadé, quoi qu’il en coûte.
Le pas se presse dans son sillon sans tenir compte de la mise en garde, mais l’arme gravée à silex se loge entre ses doigts habiles. Féline allure le rattrape sans peine, comme une impromptue nocturne. Et la pointe pistole se colle au dos robuste sans se laisser impressionner. Cliquetis léthal s’enclenche et résonne avant ses mots. "Stop right there kraken." Dégoût file entre canines, contre ceux qui lui ont pris pater il y a des années. Alors l’instant se fait revanche avec cette unique chance. "You’re under arrest."



@roy howler

Sa voix ténue et rauque tout à la fois –divine ; elle la contrôle suffisamment pour passer soudain d’un murmure à un aboiement lorsqu’elle lui ordonne de s’arrêter. Mais en face, ça rebondit à peine alors qu’il se rend quand même. Il est sûr de lui, et elle est sûre d’elle, se tient debout affrontant du regard le kraken, les jambes bien ancrées sur terre. Comme lui. Défi à la David et Goliath. Et la différence de prestance fait le reste. Ombre sombre du fugitif ne se défait pas de son aura de vaurien qui l’engloutirait bien. Menace illicite et prévisible sonne malgré les mots joueurs. Impudent. Elle brille peut-être trop dans l’tableau. Trop propre, trop lisse. Réveille probablement instincts sales et destructeurs. Elle en a conscience, garde contenance alors que sueur froide lèche échine de la rouquine. "Keep quiet. And move ahead." Ordre à nouveau de la pointe de son arme qui gigote sous son nez. Et elle se vexe quand il suppose qu’elle n’a pas réfléchi bien loin à ce qu’elle faisait. Offensée qu’un déchet kraken la prenne de haut, la réplique ne vient pourtant pas, supplantée par hypothétique embuscade. Le paysage alentour se fait marécage mouvant. Marasme puant prêt à dévorer innocents présents. Hypervigilance la rend plus consciente de sa faiblesse d’humaine et quand il s’avance, elle recule et tire. Comme une novice effrayée, il l’a fait plier et elle déteste ça. Respiration se coupe à mesure que le corps se tord en arrière mais dans ses yeux s’impriment dégoût et haine qu’elle retient de siffler entre ses dents. Obstination à lui faire face sans lui donner ce qu’il veut. Il a pourtant l’ascendant. La bête s’impatiente et désarme belle si facilement. La honte l’étreint, rougeoie sur peau de lait. Il s’installe imposant puissance kraken comme jamais, et elle se sent petite, entravée par le spectre chiendent. "Don’t-touch-me." Volonté de fer grignote frayeur, refuse le déshonneur dans un entêtement dangereux.

Saisit opportune proximité pour le surprendre : griffe derme de son visage et repousse l’étranger à bras l’corps pour mieux s’élancer contre lui… agrippe main armée et mord pour le faire lâcher. Tumulte les fait échouer à l’opposé, cogne briques délabrées et espère qu’il saigne dos du paysan qui le cueille. Termine par genou contre joyeuses –il perd de sa hauteur et elle abat poings liés contre nuque. Agilité soudaine et furtive. Réminiscence des enseignements pratiques de l’école de guerre, même si elle serait plus à l’aise l’épée à la main dont elle cultive l’art encore au quotidien. Ressort alors dague damassée collée jusque-là à sa cuisse et plante la lame dans l’épaule de Barbe noire. "I'm the Navy officer who'll put you in jail, where you belong." Crache orgueil et dégoût dans un acharnement sans faille, passe main sur ses lèvres pour essuyer affreux goût qu’il a laissé lorsqu’elle l’a attaqué. "You really think I’m that unprepared to face a scum like you?" Ricane en reculant, mais essoufflée et priant intérieurement de pouvoir remettre la main sur pistolet. "You underestimate us. You are a disgrace to all living beings. If I could, I wouldn’t even touch you or breath the same air as you. But duty calls." Lueur de la lame revient filer sous leurs yeux océan, menace effilée suffira-t-elle ? Lune pour seule témoin. "And nobody cares about your fate." Signe de tête vers les tavernes où les vies n’ont cessé de tournoyer, sourdes au feu tiré et aux batailles des pauvres qui leur ressemblent. "Now... I'll say it again: move ahead. Confiance immature gonfle poitrine, croit qu'elle a gagné la partie alors que géant de fer se redresse... échaudé et prêt à la dérouiller au prochain plaidoyer.


@roy howler