Astreinte à domicile. Astreinte au cachot de son intellect amenuisé. Arrivée chez elle en une fin d’après-midi délétère dans l’immense demeure aux fantômes criards, subconscient anémié du capharnaüm de son passé. Le néant comme compagnie forcée, le temps gâché défilant en la narguant d’impunité. Bibliothèque personnelle observée en une curieuse apprêtée. Arrogance de ses convictions mise à l’épreuve de cet emprisonnement cérébral forcé. Accusation encore prise comme éhontée. Soit. L’épreuve commençait sous un silence de plomb entre les murs de l’habitation vidée de toute vie réjouie. Portraits aux murs reflétant une vie trépassée qu’elle s’acharne à préserver et qu’on lui interdit de récupérer. Ombre de l’amiral sermonnant comportement qu’elle ne peut refouler, encore moins entre ses propres murs supposément être son foyer. Entreprise personnelle, épreuve du mari trépassé s’entremêlent aux tribulations de sa fratrie en perdition. Notes prises du carnet familial dorénavant aux mains du cadet qu’elle relit dans une inlassable déraison à en perdre notion du temps et de l’entendement. Personne n’empêchera l’écume de ses réflexions pathologiques, accroissement de l’inconnu et de l’éternel recommencement éperdu.

Voilà qu’encéphale subitement s’éveille au carillon sonnant l’heure reflétant un crépuscule chatoyant d’apaisement en ce chaos édifiant. It’s dinner time. Vendredi soir. Une habitude préservée religieusement envers la pupille héritée de l’école et accueillie au sein de sa maisonnée. Rien n’avait été préparé pour recevoir la jeune femme choyée. Se lève précipitamment de son fauteuil satiné, fait tomber paperasses qu’elle avait accumulées pour occuper son “temps libre”, non-sens dégradant. Cuisine engouffrée, réalisation du manque d’ingrédients pour ses recettes habituelles. Improvisation de rigueur. Une heure pour préparer un menu complet. Sauver les apparences surtout auprès de celle qui la connaît de près et sera intransigeante face à son habituelle excellence. Masque du cheffe enfilée, tablier noué derrière les reins. Toujours commencer par la fin, dessert aux fruits secs qu’elle expédie presque aussitôt pour ensuite s’attabler au plat principal aux effluves de la mer saupoudrée d’épices raréfiées dont elle aime agrémenter ses mets pour papilles aériennes. Daurade de la veille qu’elle assaisonne avec herbes diverses. Lorsque soudainement, grelot résonne l’arrivée de la prunelle aux aguets. Toujours présente, toujours à l’heure. Cuisson se devait d’être surveillé, chaque seconde compte. Mais inenvisageable était l’idée de la laisser patienter sur le corridor en cette fraîche soirée. Apparence discutable pour les camarades de table. Le temps jouait contre elle. L’hôtesse se devait de répondre à l’appel. Trottine jusqu’à son entrée afin d’ouvrir la porte, quelque peu essoufflé. « Aster, my dear. Right on time as always. » Sourire débonnaire en accueil chaleureux. Dentition éclatante d’apparence trompeuse que la splendeur ne peut faire éteindre allure effréné du tablier tâché et de ses mèches échevelées. « Please, come in. » Invitation cordiale, le bras tendu en sommation à entrer dans la demeure aux effluves chaleureuses de mondanité. « Can you wait for me in the libra… no, the living room will be better. » Se remémore ses notes et ouvrages éparpillés qu’il était préférable de laisser choir sans regard extérieur avisé. « I’ll be there in less than five minutes. Meanwhile, could you set the table for me, please ? » Demande pouvant sembler d’une extraordinaire banalité si les habitudes forcenées de ces dîners n’avaient pas acclimaté sa visiteuse à un scrupuleux emploi du temps minutieusement respecté. Tourne le dos en tornade édifiante. Retourne dans la cuisine pour s’assurer de la cuisson de ses daurades à la chair devenue trop hâlée par un feu embrasé. Crépitement déclaré pour une douce rémission culinaire dont elle stoppa tardivement la concoction marine. La cuisine était une science rigoureuse qu'elle menait d'une main maîtrisée sans être une experte achevée. Réfléchis aux apparences sauvegardées. Dissimule la cuisson gâchée par une sauce citronnée conservée à l'acidité programmée. Sois celle qu'on te demande d'être, la parfaite hôtesse, la parfaite mondaine. La parfaite imposture malsaine.

@Aster Mordred
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