Inquiétude enfermée dans sa petite case, bloquée à double-tour dans le recoin le plus sombre de sa caboche. Là ou se tisse les toiles d’angoisse, les amas de tristesse et les murs marbrés de fêlures douloureuses. La porte grince, menace de s’ouvrir, de céder  sous le poids de ses émotions. L’orage y fait rage, tempête et se fracasse contre les recoins de sa petite cellule d’endiguement. Les phalanges s’affairent sur les petits paquets, annotent les diverses préparations avec soin. Les gestes répétitifs à la mécanique bien rodée, s’attarde sur le moindre détail, mesure chacune de ses respirations. Le silence s’engouffre dans ses synapses, l’oppresse dans l’absence de rires qui devraient pourtant résonner dans la petite maisonnée. Qui lui rappelle le manque, le trou béant qui se creuse dans le creux de la poitrine.

Silhouette douloureusement familière qui passe la porte d’entrée. Le myocarde tressaute, manque quelques battement de coeur alors que les céruléennes dévorent les traits du pirate. Un poids qui s’envole des épaules trop fragiles, laisse l’oxygène refaire sa place au creux de ses côtes. « Abel ? » Murmure qui s’élève, incrédule. Espoir fragile, ténu, alors qu’elle soupçonne le sommeil de s’être emparé d’elle sur la table de la salle à manger. La seconde qui s’éternise alors qu’elle n’ose pas bouger, la peur de se réveiller qui s’installe dans ses méninges fatiguée. La néréïde se relève pourtant, finit par s’élancer vers le blond, les bras fin entourant son torse, le minois caché contre son épaule, alors qu’elle refuse de croiser son regard. Pas quand les larmes viennent brûler ses paupières. « You’re back. »  Les phalanges se crispent contre le tissu de son haut, cherche un point d’ancrage pour s’assurer qu’il est bien là. « I’m really mad at you, you know ? »  Voix qui se casse à moitié et la trahit, le soulagement bien trop visible malgré sa volonté de lui en vouloir pour toute cette inquiétude dont il n’est pourtant pas maître. La kraken se décale légèrement, les dextres s’emparant de son visage avec délicatesse pour vérifier l’absence de la moindre blessure, récente comme ancienne. « If something like that happens again, I swear that i’ll present myself as a man to come and search for you myself. No matter how many mermaids, leviathan or kraken there is in my way. No matter how many pirates either. Do you hear me ? »  Les sourcils se froncent alors qu’elle finit par croiser son regard. Menace alors que la tempête essaie de sortir de sa cage, l’envie de gronder, de montrer les crocs, n’ayant pourtant que la crédibilité des petits poissons colorés et pas des requins affamés.  « I don’t want to loose you, okay ? Not now. Not ever. »  Demande injuste, impossible à tenir. Pas dans ce monde, pas avec la vie qu’il a choisit de mener. Sauf qu’elle réclame, pourtant.

 @Abel Howler
crédit; vixen (code), pinterest (gif), lemony snicket (citation)

Semaines d’horreur précédaient leur revenue tant attendue. Depuis combien de temps n’avait-il pas mis pied sur l’île sacrée ? Les minutes paraissaient des heures, quand les heures prenaient la forme de jours. Le temps distordu impossible à refiler, les évènements terribles complètement chamboulés dans son esprit. Ne sait plus quand ils sont partis, quand ils ont coulé, quand sa main a été marquée. A nouveau tout est flou, réaction semblable à la perte maternelle, celle qui l’aliène, l’empêche de s’accrocher à l’instant présent. Alors pour éviter de s’éloigner, Abel énumère les événements; la marque sur ses côtes lui rappelle la mort mater, quand sa main meurtrie retrace la malédiction de la mer. Présent imprimé, peut avancer sans se perdre dans le passé.
Une fois à terre, sait qu’il doit aller s’excuser; si ce n’est montrer qu’il est bien en vie. Alors Abel prend la route imprimée sous sa rétine, et s’arrête un instant avant de rentrer. Sait parfaitement qu’il a causé inquiétude et calamité, doit désormais l’affronter sans flancher. Inspire, expire. Pousse la porte et dans la petite pièce de l’échoppe, le carillon résonne. Là, penchée sur la table de travail, Zora lève la tête de ses sachets.

oh
her voice as soft as the earth,
so relieved he could scream.

Comme il s’en veut; n’a jamais voulu l’inquiéter, l’attrister. Alors la seule chose qu’il peut dire, il le fait; “i’m sorry, zora.” main passée dans sa nuque, gêné par la réprimande. Sait bien qu’il le mérite, après tout. L’autre est gardée au chaud dans sa veste, encore terriblement douloureuse. Mais ne s’en plaint pas, n’a pas dit un mot depuis que l’encre a rejoint ses veines. “i expected no less from you, idiot.” qu’il a le culot de répondre, un sourire dessiné au coin des lèvres. Et puis se rend compte qu’elle le tient, l’accroche; veut pas le laisser partir, ose pas le laisser s’éloigner. Alors Abel ne résiste pas, passe son bras libre derrière les épaules de la belle. Il la serre doucement, menton posé sur sa tête. “i’m here, silly. never planned to go anywhere, y’know?”
Pourrait presque l’entendre protester, mais choisit de profiter. Pouvait pas mentir, elle lui avait bien manqué. Finit par s’éloigner doucement, glissant son autre main dans sa poche; “how have you been?”

@zora blomgren
[crédit; pinterest]